La coopération entre élèves dans la salle de classe : Comment les enseignants de l’IFS donnent vie à l’apprentissage coopératif
Le programme IFS donne naissance à une collaboration de recherche avec l’éminent expert enseignant-chercheur Sylvain Connac sur l’apprentissage coopératif, encourageant le “désir d’apprendre” au travers d’un travail d’équipe.
La coopération entre élèves : un outil pédagogique pour développer le désir d’apprendre
Sylvain Connac, enseignant-chercheur en Sciences de l’éducation à l’Université Paul-Valéry de Montpellier et au LIRDEF (Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Didactique, Education et Formation), est un pédagogue et chercheur français, connu pour ses travaux dans le domaine de l’éducation et des pédagogies coopératives. Il est également auteur de plusieurs ouvrages portant sur les pratiques pédagogiques innovantes et le travail collaboratif en milieu éducatif.
Dans le cadre du programme de développement professionnel de l’IFS, une vingtaine d’enseignants se sont inscrits à un groupe de recherche pour travailler en collaboration avec Sylvain Connac sur les méthodes d’enseignement autour de la coopération dans la salle de classe.
Après quelques réunions en visio-conférences avec nos enseignants, M. Connac est venu en personne à Singapour pour travailler avec eux sur des cas pratiques avec les élèves. Nous avons profité de sa venue pour lui poser quelques questions :
Pouvez-vous nous expliquer votre métier et quels sont les principaux thèmes de vos recherches ?
En tant qu’enseignant-chercheur, mes responsabilités tournent autour de trois axes : mes charges d’enseignement, mes responsabilités universitaires et mes activités de recherche.
Mes recherches se concentrent principalement sur la prise en compte de la diversité des élèves, sur les pédagogies scolaires et plus spécifiquement sur la gestion de l’hétérogénéité. Dans ce cadre-là, j’ai été amené à creuser les relations horizontales entre les élèves et à analyser la place de la coopération pour améliorer l’apprentissage.
Avec un groupe d’enseignants de l’IFS, nous faisons une recherche collaborative sur le thème de la coopération et je suis à l’IFS pour observer et interroger les élèves sur des pratiques où ils sont amenés à coopérer pendant les cours. Nous essayons d’analyser les pédagogies des enseignants à partir de ce que les élèves en disent, pour faire la part des choses entre ce que les enseignants veulent en faire et ce que les élèves en comprennent, et ainsi cela permet de lever les malentendus.
Je filme les activités puis je fais des entretiens avec les élèves et j’essaie de comprendre ce qui se passe dans leur tête quand on les voit faire. En tant qu’intervenant extérieur, les élèves savent que je ne suis pas venu pour les évaluer et cela me permet de collecter des données puis les analyser avec les autres membres du groupe.
A travers les observations que nous faisons ensemble, l’enseignant peut aussi mieux apprécier les éléments invariants du processus d’apprentissage, quels que soient les élèves ou les disciplines. Par exemple, avant de coopérer, on s’est aperçu que les élèves aiment avoir un temps tout seul pour réfléchir à ce qu’ils vont dire pendant la coopération.
Ce qui est important, c’est de réussir à adosser ces recherches avec les enseignants à leurs préoccupations professionnelles. Nous réfléchissons ensemble sur ce qu’on construit en termes d’objets, d’hypothèses et de conclusions pour la recherche commune.
Quelle impression vous a donné notre établissement ?
A l’IFS, c’est un public particulier, de caractère cosmopolite et international. Les élèves rencontrent assez peu de difficultés d’apprentissage et sont volontaires dans les propositions pédagogiques qui leur sont proposées. Mais ce n’est pas pour autant que la pédagogie est plus facile. On peut toujours sophistiquer les méthodes d’enseignement, faire attention aux détails et on peut toujours creuser la relation pour aller plus loin.
Quelle différence entre le curriculum français et d’autres enseignements internationaux ? Comment voyez-vous l’école ?
C’est difficile pour moi de comparer les différents systèmes car même à l’intérieur d’un même établissement, il y a beaucoup de disparités.
En ce qui concerne le système français, la particularité est qu’il y a une volonté de développer la réflexivité. La réflexivité, c’est l’idée d’une démarche par laquelle l’élève s’interroge soi-même (comme s’il se regarde dans un miroir) et où il est interrogé par autrui (qui lui renvoie ainsi une image) sur ses propres actes et ses propres discours. L’école française a également pour objectif de mettre du sens dans ce qu’on apprend, ne pas prioriser des activités mécanisées, routinières, systématiques.
L’école de demain devrait rester l’école, un lieu physique, une cité. Les solutions numériques ne peuvent pas remplacer l’école car apprendre, c’est plus facile avec les autres. L’école de demain devrait être l’école de la relation. C’est plus facile d’apprendre dans une relation avec d’autres humains, des enseignants avec un visage, un corps, un regard, avec une importance attribuée à ce qui se joue dans la relation avec les autres.
Pourquoi avez-vous choisi de vous spécialiser sur le sujet de la coopération ?
En France, on parle de « réarmement civique de la jeunesse », réintroduire l’autorité, la soumission aux enseignants alors que la véritable problématique de la relation pédagogique, c’est qu’elle devrait être construite sur le respect réciproque et non l’imposition d’un pouvoir. La réciprocité est très importante. Quand les élèves apprécient un enseignant, ils ne parlent pas de respect mais de confiance.
Les enjeux de l’éducation à la relation concernent le fait de développer des relations car il est plus facile d’apprendre avec d’autres, et pas forcément des adultes.
Ce qui est intéressant dans un groupe, c’est qu’il puisse y avoir un conflit d’idées, ce qui permet d’interroger la solidité de ses certitudes et ensuite chercher les réponses à ses questions.
Il est essentiel de continuer à développer et encourager le besoin d’apprendre. Le savoir enseigné à l’école doit venir en réponse à des questions que les élèves se posent pour que l’apprentissage soit efficace. Ce qu’on veut éviter, c’est que les élèves viennent à l’école pour avoir des réponses à des problèmes qu’ils ne se posent pas.
Le travail coopératif, à la différence du travail collaboratif qui peut augmenter les inégalités, a l’avantage de stimuler le travail pour atteindre des buts individuels et non pas un but commun.
Quels sont les défis de la coopération ?
Les défis majeurs de la coopération résident dans la résistance à deux tentations courantes chez les élèves. Tout d’abord, il y a la tentation de l’évitement, où l’élève, confronté à un problème, cherche à contourner la difficulté en se tournant vers des camarades plus compétents pour qu’ils accomplissent la tâche à sa place. Deuxièmement, il y a la tentation de procrastination, où l’élève, disposant de temps, choisit de différer l’exécution de la tâche à plus tard.
Les enseignants sont donc confrontés au défi de mobiliser les élèves dans des activités coopératives en leur expliquant que tout travail accompli individuellement ou en collaboration constitue une contribution précieuse pour alléger leur charge de travail future. L’idée, c’est d’expliquer aux élèves que la coopération va les aider à apprendre.
Mise en place d’une communauté d’apprentissage : L’expertise de Sylvain Connac joue un rôle actif dans les avancées de l’IFS en matière de méthodes d’enseignement.
En résumé, la collaboration entre les enseignants de l’IFS et le chercheur français en éducation Sylvain Connac marque une avancée significative dans la promotion de l’apprentissage coopératif au sein de notre contexte éducatif. Les perspectives de Connac, obtenues à travers une collaboration de recherche approfondie, fournissent des informations précieuses sur les pratiques pédagogiques qui stimulent un réel désir d’apprendre. La persévérance constante pour améliorer les méthodes d’enseignement, conjuguée aux observations de Connac lors d’interactions en personne avec les élèves, met en lumière un engagement collectif à progresser et à faire de l’école un espace de connaissance interactif.
Les réflexions de Sylvain Connac sur l’IFS en tant que communauté distincte et cosmopolite mettent en lumière l’importance de perfectionner les méthodes d’enseignement et d’approfondir les relations. Son accent sur les caractéristiques uniques du programme français et sur l’avenir de l’éducation souligne la nécessité de la réflexivité, de la construction de sens, et du rôle irremplaçable des écoles physiques en tant que centres dynamiques d’apprentissage. Alors que nous naviguons à travers les défis de la coopération, la communauté de l’IFS demeure résolue dans sa quête de pédagogies innovantes répondant aux besoins éducatifs actuels et contribuant au développement holistique de nos élèves.